Saint-Etienne : les cinémas entre 1904 et 1919
L’implantation des premières projections cinématographiques se concentre dans un périmètre extrêmement restreint : sur la principale voie de communication nord-sud, dans une zone circonscrite au centre-ville stéphanois, tel qu’il se met en place dans la première moitié du 19e siècle, autour de l’Hôtel de Ville et de la Préfecture. Secteur éminemment bourgeois en raison de sa proximité avec les activités prestigieuses de la Fabrique (soierie, passementerie) et la concentration de commerces de luxes, cafés, banques et établissements culturels. Les premiers spectacles cinématographiques apparaissent dans d’autres quartiers que sont celui des Gauds et de Saint-André, secteur à vocation institutionnelle, commerciale et culturelle. L’extrême concentration des premiers établissements cinématographiques autour d’un axe nord-sud s’explique par la topographie de la ville (vallée de collines) mais aussi le développement des lignes de tramway. Enfin, ces projections ont lieu en majorité au sein de salles de cinéma ou d’établissements d’ordre populaire (café, salle de bal, jeu de boule…).
Peu de changements s’opèrent entre 1910 et 1914 pour ce qui est de l’exploitation cinématographique sédentaire à Saint-Étienne. Pour autant, on assiste à une expansion embryonnaire de l’activité vers des quartiers plus excentrés ou jusqu’à présent vierges de la présence de spectacles d’images animées : l’Est de la ville, et notamment le quartier prolétaire et industriel du Soleil. La dynamique de normalisation de la salle de cinéma fixe comme espace privilégié de la projection cinématographique reste relativement atone à Saint-Étienne jusqu’en 1914.
La Première Guerre mondiale vient confirmer la prééminence de la salle de cinéma dans l’espace urbain stéphanois comme lieu privilégié de diffusion du spectacle cinématographique au détriment d’autres établissements culturels. Néanmoins, la dynamique d’installation de nouveaux lieux de projection s’affaiblit considérablement pendant le conflit. Le nombre d’adresses cinématographiques reste en moyenne stable malgré une dynamique atone depuis 1904. Elles se concentrent principalement autour de l’axe de circulation Nord-Sud. Il est intéressant de constater que parmi les nouvelles adresses à ouvrir entre 1914-1919, un grand nombre ouvrent dans la moitié sud de la ville et dans des quartiers extrêmement périphériques et prolétaires, soit des secteurs jusqu’à présent délaissés par ce divertissement. Ces dynamiques laissent entrevoir des prémices dans un rééquilibrage de l’activité entre le nord et le sud de la ville.